Interview – Richard Muhima : « Je crois que c’est le moment pour moi d’impacter le monde et de montrer le chemin à tous ces jeunes journalistes »

Interview – Richard Muhima : « Je crois que c’est le moment pour moi d’impacter le monde et de montrer le chemin à tous ces jeunes journalistes »

Ses débuts dans le metier de journaliste, ses obstacles surmontés, ses défis, ses détracteurs, sa conception du football congolais, ses rêves…aucune question n’a échappé à Richard Muhima, actuel président de l’Association des Journalistes Sportifs du Congo, section du Nord-Kivu, au moment de décoller pour Kinshasa ou il est parmi les 5 journalistes congolais invités aux états généraux des sports, initiés par le président Felix Tshisekedi dans le but de sortir le paysage sportif dans le pétrin. Discussion avec l’un des journalistes sportifs les plus influents de la RDC.

Richard Muhima avec Christopher Oualembo aux États Généraux des sports au Kongo-central ( 2022)

Faire du journalisme sportif est-il une passion pour vous ? Parlez-nous de vos débuts dans ce metier.

Des débuts très compliqués ou il fallait être enthousiasmé de ce que font ou faisaient les autres mais aussi exercés. J’ai débuté, d’abord comme analyste sportif, ensuite j’ai été consultant car je suis un ancien pratiquant du sport jusqu’au point de devenir un journaliste sportif. Ça n’a jamais été facile pour moi mais au moins, aujourd’hui, je suis en train de récolter les fruits d’un travail de fonds qui a été abattu tout juste au début. J’ai tenté ma première expérience à la radio RTGB, les gens ont admiré car j’étais doté d’une culturelle générale qui était appréciée par plus d’un. Cela m’a donné beaucoup de force de faire carrière dans ce metier. Il y a à l’époque, déjà, des ainés qui avaient couvert des grands évènements sportifs et on n’avait donc du mal à s’imposer facilement. Je ne me rappelle pas chronologiquement comment ma carrière se suit mais si je ne me trompe pas, c’est en 2011 ou 2012, que je me suis lancé en fonds jusqu’aujourd’hui ou je continue à faire mon petit chemin.

Plus de 10 années déjà que vous exercez ce metier, toujours affuté comme jamais, on peut dire que vous êtes fier de votre orientation ?

Plus de dix ans, oui mais à un moment il faut dire que ce n’est pas spontané. J’ai commencé par le « commencement ». J’ai été stagiaire pendant un moment avant que je ne sois reconnu comme journaliste. Certes, j’aimais les médias traditionnels (radio et télé) mais j’étais aussi passionné par l’écriture surtout que je suis un homme des lettres, je fais le latin philo au secondaire. Je me suis dit qu’au moins je dois avoir un média en ligne et heureusement, ce média est devenu un peu rapidement le deuxième blog le plus ancien que j’ai créé depuis 2014. Je ne suis pas très fier de mon parcours car je suis un homme des défis. Je suis en train de gravir les échelons mais je n’ai pas encore atteint le niveau que je souhaite. J’ai encore beaucoup de chemin à parcourir. Je suis un journaliste qui n’a pas des limites, la seule limite c’est le ciel. Je ne veux pas aussi m’en orgueillir car ce que je fais est apprécié par plus d’un mais je veux percer, et pourquoi pas ne pas impacter le monde journalistique sur le plan international comme font déjà certains confrères journalistes africains. Raison pour laquelle je ne peux pas parler de fierté pour l’instant, c’est encore très tôt.

Parce que vous venez de l’évoquer, il y a 7 ans, vous avez créé Totalementsport, un des premiers sites internet spécialisés en sport à l’Est du pays, parlez nous de ce projet et pourquoi aujourd’hui c’est quasiment mort ?   

C’est un média que j’avais crée pour essayer de soulever le défi. Je me suis rendu compte que le paysage sportif nord-kivucien n’était pas vendu sur la toile. On était largement en retard par rapport aux confrères de Kinshasa et des autres villes. Je me suis posé mille et une question pourquoi c’est facile de trouver les informations sur les petits clubs de la capitale mais c’est impossible de trouver pour Kabasha et Virunga, des vieux clubs, sur Google. C’est ce qui m’a révolté. Totalementsport a fait ses preuves depuis tout ce temp, a su vendre positivement l’image du paysage sportif de la partie orientale de la RDC car, ni à Bukavu, ni au Maniema, je pense qu’à l’époque il n’y avait pas des médias en ligne. Grace à ce média, il y a plusieurs talents qui ont été dénichés au niveau national voire internationale et d’autres médias en ligne ont pu naitre par la suite. Le média n’est plus très chaud actuellement parce qu’il a atteint sa mission en grande partie qui était de vendre positivement l’image de l’environnement sportif de l’Est du pays mais aussi montrer au monde entier qu’ici il y a des jeunes qui sont de très bons acteurs sportifs. C’est chose faite. Ce qui reste c’est d’entamer la deuxième phase de ce grand projet et très bientôt, on va fixer l’opinion publique.

Qu’est-ce que ça vous avait fait d’être le plus jeune président de l’A.J.S.C Nord-Kivu ? C’était une charge ou une fierté ?

Richard Muhima avec l’ex président de la FECOFA, Costant Omari Selemani aux Etats généraux des sports au Kongo-central

À un moment je me suis dis que nous jeunes, on a de potentiels, nous avons des arguments à faire valoir mais de fois nous tombons dans une passivité qui ne nous permet pas d’évoluer. J’ai beaucoup de respect pour les gens qui ont vécu avant moi mais ils n’ont pas le monopole de la gestion. Si eux peuvent le faire pourquoi pas nous aussi ; raison pour laquelle j’ai ajouté une dose juvénile dans la gestion de l’A.J.S.C/N-K et aujourd’hui il y a quand même des fruits. C’est vrai, c’est du droit de tout un chacun de critiquer mais au moins, à l’allure ou vont les choses, on sent qu’on est en train de franchir les paliers qui me semblent intéressant n’en déplaise aux détracteurs, qui doivent toujours être la, on essaie un peu de faire ce qu’on peut. L’âge n’est qu’un chiffre. Je crois que c’est le moment pour moi d’impacter le monde et de montrer le chemin à tous ces jeunes journalistes.

Il y a 3 mois, vous avez été reconduit pour un nouveau mandat, tout semble marcher comme c’était prévu durant la campagne ?

Je suis un homme des défis même s’il m’est arrivé de penser à laisser mais je me suis rendu compte que j’avais tout un stock à vider. Pour ce deuxième mandat qui est axé sur le renouveau, la priorité c’est beaucoup plus aux journalistes de l’intérieur de la province. J’essaie de faire le déplacement, contre vents et marrées et malgré toutes les difficultés liées à l’insécurité, afin d’aider les confrères de l’intérieur à bien jouer leur rôle.

Richard Muhima, président de l’association des journalistes sportifs du Congo section du Nord-Kivu

Si on devait vous demander de quoi de concret avez-vous déjà offert au sport du Nord-Kivu et de la RDC en général, quelles seraient vos réponses ?

Mon intelligence. Moi j’ai apporté beaucoup plus mon intelligence. J’ai également un reflexe qui me permet de voir les choses autrement. Si je constate que quelque chose ne va pas, j’ai cette facilité de faire les propositions pour le bien du paysage sportif. Les petites choses que j’ai grâce à mon observation et à mon expérience, je les mets au service de notre corporation. Raison peut-être qui a fait à ce que je puisse être appelé pour apporter mon petit savoir aux états généraux des sports initiés par le président Tshisekedi. Ce n’est pas donné à tout le monde. Je ne dirais pas que c’est un cadeau mais au moins je me suis dit que j’ai eu à apporter quelque chose de bien pour le sport en RDC et je vais continuer à me battre.

Vous connaissez parfaitement tous les rouages du football congolais, vous avez quasiment visité toutes les grandes villes du pays et selon vous, pourquoi le football congolais est en baisse comparativement à la décennie qui vient de s’écouler ?

Le problème du football congolais, c’est d’abord les hommes parce qu’on a toujours tendance à faire table rase. Certains hommes qui chapeautent les différents départements qui gèrent le football congolais, de fois ils tombent dans les egos, ils n’ont pas le temps de se faire entourer par les gens qui maitrisent les rouages du football. Ce n’est qu’en RDC ou on peut voir quelqu’un qui chapeaute et se fait entourer par les membres de sa famille. Par exemple en Europe, le PSG ou Marseille ne sont pas dirigés par des français. Cela veut dire qu’on doit plutôt faire recourt aux gens qui maitrisent. Chez nous on ne met pas les hommes qu’il faut à la place qu’il faut et si ça continue, en aucun moment on pourra évoluer, malheureusement.

Je me rappelle qu’à l’une des nos conversations téléphoniques avec vous, vous m’avez dit que vous ne rêvez pas prester pour Canal Plus ou autres grandes chaines mondiales mais vous voulez créer le Canal Plus congolais. C’est toujours le cas ou vos rêves ont changé ?

Non. De fois je me dis que c’est bien bon d’aller vivre à l’étranger mais on n’a jamais été à l’aise à l’extérieur de son pays. Par exemple pour Goma, la plus belle ville de la RDC, elle peut abriter les installations d’une chaine calquée sur le modèle d’une chaine comme Canal Plus. On a tous ce qu’il nous faut pour travailler raison pour laquelle je me dis, qu’au lieu d’aller travailler pour Canal Plus même si l’opportunité se présentait je ne peux ou ne pas mettre de côté cette opportunité, mais pour moi l’Ideal serait d’avoir Canal Plus à partir de Goma et qu’on puisse appeler certains français pour venir travailler ici. Au Maroc, pour la radio Mars, par exemple il y a des journalistes qui quittent la France pour travailler sur ce média. Ce que Charles Mbuya abat comme travaille, personne ne pouvait l’imaginer mais il a brisé certains mythes. Il y a beaucoup de talents journalistiques au pays qui manquent juste de la lumière. Les idées sont là mais ce sont les moyens qui manquent pour atteindre cet objectif.

Au-delà de votre metier de journaliste sportif, il semble que le travail d’agent des joueurs de football vous tente au quotidien. C’est aussi un de vos rêves ?

Absolument. Je suis un peu dragué par le management de sport. Moi, je suis au service de tout le monde. Je me trouve être capable de manager certains jeunes joueurs d’ici. Actuellement, ce ne sont pas forcement les meilleurs joueurs qui jouent dans les grands clubs mais ce sont les joueurs les plus visibles. Ce domaine reste un défi très majeur, non seulement pour la partie orientale, mais pour la RDC en général. Il est temps qu’on puisse réfléchir autrement afin que nos joueurs évoluent aussi dans les grands clubs.

Quels sont les conseils que vous pouvez donner à tout celui qui rêve d’emboiter vos pas ?  

Il faut d’abord se connaitre. Il y a ceux qui embrassent la carrière de journaliste pourtant ils seraient mieux ailleurs. Je ne suis pas tombé comme un cheveu dans la sauce pour le journalisme, c’est ma passion et plus spécialement le sport qui m’enthousiasme. Tout le monde peut venir faire carrière en journalisme mais tout le monde ne peut pas faire carrière longtemps parce qu’au départ beaucoup sont éparpillés dans les idées. Un bon menuisier ne peut pas faire un bon journaliste à la longue.

David Kasi

Interview